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Les voilà qu’ils arrivent… les nouveaux inquisiteurs !*

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Randy Namite, grand voyageur, dont les pensées nitroglycérinées font sauter les murs de la fausse évidence et de la logique imposée, discutaille avec un jeune novice de la vie en société dans un amphithéâtre que bon nombre d’étudiants fréquentent plus par convention que par réel intérêt intellectuel, entre deux distractions extra scolaires. Il est question pour le novice de morale, de droits de l’Homme, pardon, de l’Humain, et d’égalité pour tous, y compris pour ceux qui ne demandent rien.

Le novice :

Ce débat sur le « mariage pour tous » me fatigue, alors que les partenaires sociaux viennent de négocier une flexibilité qui va permettre une réduction des coûts salariaux des grandes entreprises, dans le but de les aider à faire face à la crise et à la mondialisation, dont elles ont par ailleurs profité, tout en préservant en théorie des emplois.

Randy :

Eh oui, la stratégie appliquée aux salariés français s’avère forcément défensive. Dans certains secteurs, il faut désormais se serrer la ceinture pour conserver quelques temps encore son emploi. Les pays voisins du sud de l’Europe, bien mal lotis, ne viennent pas à nous, en vérité c’est nous qui allons vers eux. L’harmonisation économique voulue par les chantres de l’Union européenne se réalise progressivement, entre certains pays, mais pas tout à fait comme ils l’imaginaient… 

Le novice :

Le « mariage pour tous » constitue, pour autant, une question d’importance. Cependant, quel matraquage !

Randy :

Importante pour qui ? Le « mariage pour quelques-uns » tu veux dire ! Car le slogan signifie, en réalité, le contraire de ce qu’il prétend signifier. Il faut, comme bien des slogans actuels d’ailleurs, le comprendre à l’envers… Tout d’abord, ce sont les associations homosexuelles qui demandent à marier deux personnes de même sexe, aussi je ne vois pas ce que le « tous » vient faire dans le slogan. Le « mariage pour nous » serait, à mon sens, plus juste. Ensuite, le faible pourcentage de couples homosexuels Pacsés laisse à penser que, finalement, nombreux sont ceux pour qui le mariage ne constitue pas vraiment une priorité pour le moment (lequel engage davantage les partenaires que le Pacs)…

Le novice :

Et alors ?

Randy :

Eh bien il me semble que cette revendication ne préoccupe actuellement qu’une minorité d’une minorité. De fait, cet entêtement agressif des associations cache quelque chose.

Le novice :

Quoi donc ?

Randy :

La volonté d’obtenir la reconnaissance de la PMA et de la GPA. Au fond, ces associations et ceux qui les soutiennent ont surtout envie que la société leur accorde le droit de fabrication d’un enfant. L’adoption s’avère assez complexe (trop de critères sociaux, de démarches administratives), elle constituerait pour cette minorité un pis-aller, alors que la PMA et la GPA sont des techniques médicales qui permettraient de satisfaire plus facilement le caprice de maternité de ce lobby dont l’arrogance n’a aucune limite puisqu’il estime avoir droit à un enfant comme tout le monde… Or, depuis quand la société nous doit-elle un enfant ? J’aurais droit à un enfant comme j’aurais droit à un frigo ! En outre, la PMA, utilisée à l’origine pour les couples stériles, coûte entre 5000 et 15000 euros (selon que l’on essaie une, deux ou trois fois, sachant que l’échec à la première tentative est fréquent). La collectivité devrait donc payer sans sourciller, par le biais de la sécurité sociale dont la prise en charge atteint les 100%, pour céder à un groupe de pression et à un caprice qui fera, comme tout caprice, des émules (les enfants se comportent de la sorte : ils veulent quelque chose parce que les autres le veulent aussi). Et je laisse de côté la question de la GPA qui signifie de louer les ventres, donc de les « marchandiser ». Les femmes d’origine forcément modeste, car on voit mal une grande bourgeoise porter un enfant pour autrui quand on sait combien une grossesse peut être pénible, sont d’ores et déjà priées par le grand humaniste Pierre Bergé de mettre leurs utérus à contribution, tout comme les ouvriers font tourner la machine industrielle avec leurs bras… Je trouve marrant, d’ailleurs, que certaines féministes soutiennent la GPA. Peut-être s’agit-il de femmes,  issues des classes moyennes et supérieures faut-il le rappeler, qui veulent faire un bébé « toutes seules »…

Le novice :

Vous n’y allez pas de main morte !

Randy :

La notion d’égalité invoquée pour justifier ces revendications doit être comprise ainsi : égalité dans le caprice qu’exprime si bien le fameux « j’ai droit à… », très à la mode de nos jours. Il manque toujours à ce genre de slogans et justifications un petit quelque chose… un bout de phrase… ou bien le terme approprié pour expliciter ce que tous ces revendicatifs professionnels veulent vraiment. Terme auquel ils substituent des substantifs pompeux qui ne signifient plus rien à force d’être invoqués comme autant de mots magiques censés ouvrir les portes de l’approbation collective ou bien celles du pouvoir complaisant. Et puis il y a autre chose.

Le novice :

Je m’y attendais…

Randy :

Ce combat revendicatif s’inscrit, comme toute revendication, dans une logique de pouvoir. Ce lobby, à l’instar d’autres lobbies, veut imposer sa conception du monde. Ce n’est que le début. De notoires sociologues, toujours bien inspirés, soutiennent ce progrès social annoncé. Ils feraient bien de relire Epictète ou Marc Aurel qui invitent à se demander comment sont les choses et quelle est, en fait,  leur véritable nature. Or, la véritable nature du « mariage pour tous » s’avère double. D’une part, comme je te l’ai dit, il s’agit d’un prétexte pour aboutir au droit à l’enfant et à la fabrication d’un enfant pour soi, pour une minorité d’une minorité qui revendique fièrement sa différence de mode de vie mais veut faire comme les autres (une famille et un enfant), enfin à sa convenance. D’autre part, on peut l’interpréter aussi comme la tentative d’un lobby de façonner le monde à son image (car ce lobby exige que la société transforme radicalement une institution intrinsèque à l’aune de ses revendications). En définitive, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une demande hargneuse d’un traitement de faveur, mais au nom de l’égalité, ce qui ne manque pas de culot…

Le novice :

Mais la majorité des Français approuve le « mariage pour tous » d’après les sondages.

Randy :

Comme elle approuvait, aux dires des médias, le projet de Constitution européenne ! On a vu le résultat dans les urnes… Voilà pourquoi la gauche refuse tout référendum sur cette question de société : elle a, en réalité, moins peur de la bourgeoisie catholique ou protestante que du retour des prolos dans les urnes et de leur vision du monde par certains côtés conservatrice, voire de l’influence sur les immigrés francisés en capacité de voter de l’Islam qui condamne moralement, à l’instar des autres religions, l’homosexualité. Avec cette affaire, on peut dire que les socialistes ont choisi, une fois encore, d’éluder le peuple et de légiférer sur une thématique sociétale contre son avis. Seules une partie des classes moyennes, hyper réceptives au pilonnage médiatique, et une partie de la jeunesse manipulée avec un verbiage qui flatte les grands idéaux et l’impression qu’elle a de toujours se trouver du bon côté, faisant face à l’obscurantisme, se laissent berner.

Le novice :

Euh… Je… Euh…

Randy :

Rassure-toi, ce gouvernement satisfera, au moins partiellement, les revendicatifs. On verra s’il ira jusqu’à accorder dans quelques temps et sans restriction la GPA. C’est très possible, d’autant que certains journaleux et porte-parole ont décrété que le pack dans son ensemble (mariage pour tous et droit à l’enfant) constitue une avancée sociale inéluctable comme le fut l’abolition de la peine de mort dans la plupart des grands pays occidentaux (mieux vaudrait être sourd que d’entendre cela). De plus, la religion des droits de l’Homme les soutient et ses sbires avec. Difficile de lutter contre. A l’ancienne religion, les interdits, tabous, ainsi que les frustrations/souffrances qui vont de pairs, pour approcher Dieu et contenir les instincts de la vie, à la nouvelle l’accomplissement sans limite des caprices et désirs que justifient, d’ailleurs, aux yeux de ses adeptes les errements répressifs parfois terribles du passé qu’ils éprouvent le besoin d’agiter tels de pauvres épouvantails rhétoriques.

Le novice :

La religion de quoi ?

Randy :

On a eu tort de croire que la sécularisation en Occident laisserait un grand vide que d’autres religions traditionnelles importées, en pleine mutation au contact de l’Occident, comblent en partie seulement. Une nouvelle religion « laïque », moderniste et composite a également pris le relais.

Le novice :

C’est-à-dire ?

Randy :

Les églises catholiques et protestantes mènent en France, avec le « mariage pour tous », leur dernier grand combat, un combat qu’elles perdront, tandis que la nouvelle religion, hétéroclite, celle du droit à ceci, celle du droit à cela, celle du droit de l’hommisme aussi et de l’antiracisme, qu’incarne si bien notre gauche morale, même si sa doctrine commence à déborder sur les autres partis, est sur le point de triompher, de gagner du terrain plus encore.

Le novice :

Religion, c’est un peu fort de café, non ?

Randy :

Non. L’obsession pour l’égalité et la chasse aux discriminations de toute nature ont remplacé l’obsession séculaire pour le péché et sa traque pour le débusquer derrière les attitudes les plus simples. Aujourd’hui, les nouveaux prêtres ou leurs ouailles cherchent à dénoncer ce qu’ils nomment un dérapage de langage. Il y a des mots et des discours qui sont incorrects et qu’il faut bannir au risque d’être voué aux gémonies voire traîné devant les tribunaux. Tout cela au nom du respect d’autrui et de la tolérance. La nouvelle religion prêche pour la tolérance, qu’elle s‘applique d’abord à elle-même, cela va s’en dire. Jadis une certaine inquisition torturait et brûlait au nom de la foi et de l’amour du Christ. L’époque actuelle est, de ce point de vue, bien plus douce.

Le novice :

Ok, je vois l’analogie. Mais quand même…

Randy :

Avec ce débat, tu disposes d’un bon exemple. Le terme homophobie a été utilisé plusieurs fois. Que cache-t-il ? Une volonté de pouvoir, en vérité, car il constitue une arme idéologique devenue très puissante qui finira peut-être par attiser l’hostilité envers les homosexuels à force de « terrorisme » intellectuel. Même les représentants de l’église osent à peine évoquer leur désapprobation de l’homosexualité, comme s’il s’agissait d’un délit d’opinion. En ce qui me concerne, chacun fait ce qu’il veut sexuellement parlant. Je peux, cependant, comprendre qu’un croyant condamne l’homosexualité c’est-à-dire qu’il invite ses coreligionnaires à ne pas suivre cette voie. Où est le problème dès lors qu’il n’incite pas à la haine de l’autre et ne persécute pas les homosexuels ? Mais non, pour les nouveaux inquisiteurs ne pas les approuver dans ce qu’ils sont ou dans ce qu’ils défendent et disent signifie que l’on blasphème la bonne parole droit de l’hommiste qui invite à un monde meilleur pour un futur prometteur. A chacun son paradis…

Le novice :

Nous baignons tous dans ces nouvelles valeurs, ces discours, etc. Et puis il y a du bon.

Randy :

Tout à fait. C’est d’ailleurs ce qui fait la force de cette nouvelle religion qui place l’individualisme et le désir personnel au centre de l’univers et s’insinue partout, y compris à petites doses dans des idéologies concurrentes. Mais le degré d’adhésion, ou de distance critique, varie suivant les individus et les milieux sociaux. Une bonne partie des classes moyennes y adhèrent pleinement du fait de leur recherche désespérée d’une bonne conscience en lieu et place d’une véritable conscience sociale. Le droit de l’hommisme les conforte en ce sens. Les autres n’y sont pas hermétiques, cependant leur conversion ne s’avère pas complète, voire parfois ratée concernant certains sujets de société. Quant à affirmer qu’il y a du bon… Le problème n’est jamais lié, sauf s’agissant d’idéologies folles comme le fut par exemple le nazisme, aux valeurs défendues par tel ou tel courant de pensée, mais il est lié à l’excès de zèle, à l’interprétation simpliste ou tronquée que les zélateurs en font et à l’intérêt politique et/ou économique qu’ils finissent par trouver à faire ainsi. Chaque époque a consacré ses fanatiques, prosélytes, et inquisiteurs. Il y a toujours eu des attitudes religieuses, même quand il ne s’agissait pas d’une religion au sens où on l’entend habituellement. Souviens-toi de ce que fut le communisme, ou plutôt le stalinisme. Comme le dit l’un des personnages dans le film de Costa Gavras, L’Aveu, à propos des militants communistes, en s’adressant au héros victime et survivant d’une purge politique, mais malgré cela toujours communiste : « au fond, vous êtes des croyants qui n’aimez pas l’église ». Aussi, je ne saurais que trop t’encourager à cultiver un certain athéisme, tu en auras besoin dans les années qui viennent…   

* Merci à Randy pour sa métaphore religieuse et à feu Philippe Murray, réactionnaire assumé et néanmoins grand lucide, pour ses écrits. Leurs idées m’ont inspiré ce texte pour analyser l’actualité.